Mangeons des poissons!

Le vent entaillait son visage comme une nuée de couteaux. Elle eut follement envie d’ouvrir les yeux quelques instants. Hésitante, elle ouvrit un œil, et le referma tout de suite après en poussant un hurlement d’effroi. Elle ignorait si son guide, accroche a l’encolure du griffon, était déjà mort ou s’il agonisait, suffoquant a cause de ses bras qui enserraient son cou de toutes leurs misérables forces.

Vint alors le moment d’atterrir. Raya sentit qu’ils perdaient beaucoup d’altitude, et qu’ils n’allaient pas tarder à piquer droit vers la terre. Et juste a ce moment la, dans un excès de témérité, et poussée par une force qui relevait d’instincts inexplicables, elle rouvrit les paupières. Elle vit alors la mer, dans toute son immensité et sa splendeur, et ne put s’empêcher de sourire lorsqu’elle cria de nouveau. La plage s’approchait à une vitesse démesurée, et la descente était si raide que le garçon devant elle perdit quelque chose qui semblait s’être détaché de son cou. Elle eut le bon reflexe d’attraper l’objet au vol, surprise de sa propre rapidité.

Les pattes du griffon heurtèrent le sable dans un choc. Raya poussa un grognement de douleur. Son dos avait pris un sacre coup. Tremblante comme une feuille morte sous le coup de l’adrénaline qui était monte et redescendu tres vite, haletante, elle eut besoin d’aide pour descendre de la monture.

« C’est… c’est… c’est démentiel… » souffla-t-elle.

« Il est com-ple-te-ment cingléééé!!! » pleura-t-elle dans sa tête.

Elle s’appuya sur ses genoux pour reprendre sa respiration quelques instants. L’objet qu’elle avait récupère était toujours dans sa main. Elle se redressa et pris le temps de regarder ce qu’elle avait attrape. C’était une sorte de médaillon en forme de croix attachée à un cordon fin.

« Tiens ! dit-elle fièrement en tendant au garçon le collier. Une chance que j’aie été là pour le rattraper ! »

Invité

Le voyage débuta et très rapidement, la jeune fille commença à serrer le cou du garçon. Celui-ci avait l'habitude, cela se produisait à chaque première fois qu'il emmenait quelqu'un avec lui. Reno avait donc trouvé l'astuce, il tournait légèrement la tête sur le côté afin de pouvoir respirer convenablement.

C'était un peu dommage que la jeune fille ferme les yeux, elle ratait tout du paysage. Le lac qu'ils venaient de passer, la forêt qu'ils avaient survolée... Le vent qui caressait leur visage donnait une impression de liberté. Comme si rien ne pouvait les arrêter. Reno ne remarqua même pas la perte de son collier. En tout cas, l'Elfe trouvait l'odeur de la jeune fille bizarre. Elle ressemblait à celle d'un animal qu'il connaissait...

Au bout de quelques minutes, ils atterrirent sur la plage. Le sable doux sous le soleil... Reno descendit le premier du griffon et aida la jeune fille à descendre.

" Merci Tico. "

Il avait parlé en Elfe ancien, puis il se tourna vers la jeune fille.

« C’est… c’est… c’est démentiel… »

L'Elfe la regarda et lui dit dans la langue des Humains :

" Au faite, je m'appelle Reno. Et vous ? "

Une fois qu'elle avait repris son souffle, la jeune fille se releva.

« Tiens ! dit-elle fièrement en tendant au garçon le collier. Une chance que j’aie été là pour le rattraper ! »

Reno regarda le médaillon et posa sa main sur son torse. Il ne s'y trouvait pas, c'était donc bien le sien... Il le prit et le mit autour de son cou en disant :

" Merci beaucoup... "

Une petite larme discrète coula le long du visage du garçon. Ce collier était la dernière chose qu'il avait de son père... Qu'aurait-il fait s'il l'avait perdu ? Cet objet compte tellement à ses yeux... Mais Reno se reprit rapidement et essuya la goutte d'eau du revers de sa main.

Tout autour d'eux, des animaux commencèrent à venir. Des lapins venaient des bois, quelques poissons de la mer, un loup était aussi venu. Le loup s'était rapproché de la jeune fille et le renifla et c'est là que l'Elfe tilta.

" Ton odeur... Elle ressemble à celle d'un loup... "

" Tu as deviné ce que j'allais dire, jeune Elfe. "

Le loup avait parlé dans sa langue, mais Reno comprenait sans aucune difficulté. Le griffon l'interpella ensuite :

" N'oublie pas ce que tu dois faire... "

En effet, le garçon avait une tâche à accomplir. En échange de ce genre de transport, il devait jouer de la musique aux animaux. A ce moment, une baleine fit surface proche du bord et un singe vint sur la plage. C'était Rafiki.

Spoiler:

" Bonjour jeune Elfe. "

Bizarrement, cet animal parlait le langage Humains. Il se tourna vers la jeune fille en ajoutant :

" Je vois que tu as de la compagnie... Enchanté Mademoiselle. "

Le singe au bâton s'inclina légèrement dans leur direction et Reno le salua aussi.

" Bonjour Rafiki. "

Puis, Reno les laissa pour se diriger vers la mer. Un dauphin vint l'accueillir au bord de l'eau, il se mit debout sur lui. Normalement, il aurait dû tomber mais il l'avait fait si souvent qu'il avait trouvé l'équilibre. Le dauphin le mena jusqu'à la baleine et l'Elfe monta sur son dos. Il avait maintenant une place bien en auteur. Reno s'assit en tailleur et détacha son ocarina de sa ceinture.

Pendant qu'il se préparait à jouer, un autre dauphin vint proche du sable au cas où la jeune fille voulait aller au même endroit que le garçon. Celui-ci mit le bout de son instrument dans sa bouche et commença à souffler pendant que ses doigts se baladaient sur les trous de l'ocarina.

Un doux son apparut dans les airs. C'était une mélodie qui faisait oublier les soucis. Cette ocarina, c'était la dernière chose qu'il avait de sa mère et la musique de l'instrument avait un effet apaisant. C'est pour cela que les animaux l'aiment tant, comme la plupart des gens d'ailleurs. Pour Reno, c'était une façon de ne plus penser à son passé durant quelques minutes...

Il y avait de plus en plus d'animaux dans les environs, ils venaient tous écouter la mélodie que jouait l'Elfe. Celui-ci avait les yeux fermés, il n'en avait pas besoin pour jouer et ressentait mieux chaque notes ainsi. Le son entrait dans chaque oreilles et avait un effet positif sur ceux qui l'écoutaient...

« Moi, c’est Raya. Ichigaya Raya.» dit elle en réponse après avoir rendu le collier. Elle entendit vaguement Reno la remercier, mais ca, à présent, elle s’en fichait : elle était sur la plage, et une euphorie puissante s’empara d’elle. Elle tourna plusieurs fois sur elle-même, comme pour se convaincre que tout était bien réel. Quand elle se retourna, elle vit que le garçon essuyait une larme en serrant le médaillon contre sa poitrine. Elle sentit son émotion monter en un pic vertigineux. Ce truc devait être vraiment important pour lui.

Quelques instants plus tard, pleins de petits animaux vinrent autour de tout ce petit monde, dont un singe qui parlait (elle était tellement émue qu’elle lui répondit sans se demander pourquoi elle était polie avec un singe) et un loup. La jeune fille fut attendrie par le petit loup mignon. Tandis qu’elle s’était baissée pour le couvrir de caresses, l’elfe était parti au large à dos de machins bleus qu’elle ne put reconnaitre car une cascade de larmes envahit son visage. Mais elle savait que jamais dans sa vie elle n’avait vu autant d’animaux d’un seul coup.

Une belle mélodie retentit, et sans vraiment comprendre pourquoi, elle sut qu’elle provenait d’un objet qui lui était précieux, au moins autant que le collier a croix. L’air qu’il jouait était doux et apaisant. Elle se mit à pleurer de plus belle en se disant qu’au fond, elle le sentait bien, ils avaient quelque chose en commun, quelque chose qui faisait qu’ils souffraient, et qu’une sorte de lien indéfinissable les attachaient malgré tout ce qui les séparaient.

A ce moment la, elle sortit son harmonica de la poche intérieure de sa veste et le serra fort contre sa poitrine, suffocant à moitié tellement elle pleurait. C’était un objet qui avait appartenu à sa mère et qui semblait avoir gardé sa douceur, son amour, et tout ce qui aurait pu faire d’elle une maman parfaite. Des mots lui revinrent a l’esprit, comme s’ils avaient émergé d’un lot de souvenir enterrés dans du sable.

« Toi et moi, on sera toujours ensembles, quoi qu’il arrive, parce que les amis ça reste à jamais. »

C’est alors qu’elle comprit que ses larmes étaient des larmes de joie. Elle se releva d’un seul coup, en oubliant à quel point la faim et la fatigue l’avaient affaiblie. Manque de fer oblige, sa tête se mit à tourner, mais elle ne s’en rendit pas compte.

Heureuse comme tout, elle enleva ses chaussures et ses chaussettes, et courut a toute allure en décrivant des vas-et-viens le long de la baie. Puis elle se débarrassa de sa veste qu’elle jeta sur un côté et détacha ses macarons pour mieux sentir le vent salé contre sa peau et dans ses cheveux.

A trop danser, courir, sangloter, bondir, rire en même temps, se jeter dans l’eau et revenir sur la plage, l’émotion qu’elle ressentait brûla les dernières forces qu’il lui restait et, achevée, elle s’effondra sur un lit d’étoiles, l’harmonica dans sa main gauche. Sur ses lèvres, un mot tout bête, mais qu’elle ne pouvait contenir plus longtemps se forma :

« Manger… »

Elle ferma les yeux.

[HRP : Tu apprendras que Lady Biohazard (c’est moi u.u) n’a pas besoin d’aide pour ressusciter.]

Invité

Reno continuait de jouer durant plusieurs minutes. Ayant les yeux fermés, il ne remarqua pas ce que faisait la jeune fille. Une fois la mélodie finie, plusieurs animaux partirent avec le sourire. D'autres restèrent avec l'Elfe et la jeune fille. Un des dauphins ramena Reno sur la plage d'où il vit Raya couchée sur le sable.

L'Elfe attacha son ocarina à sa ceinture et marcha vers la jeune fille pour voir ce qu'elle avait. Voulait-elle se coucher pour profiter du soleil ? En la rejoignant, il remarqua quelques habits posés par terre. Reno, lui, portait une chemise blanche à manche courte, un pendentif qui se baladait dessus et un pantalon jean bleu. Il était déjà pieds nus et sentait le sable passer entre ses orteils.

Une fois au niveau de Raya, il entendit :

« Manger… »

Elle avait les yeux fermés. Le singe et le loup vinrent aussi proche de Raya. Rafiki mit le bout de son bâton à la hauteur du visage de l'Elfe, comme pour lui dire de prendre les fruits qui s'y trouvait. Le garçon les enleva du bâton et ouvrit le fruit en deux. Un liquide se trouvait à l'intérieur. Reno mit le bout du fruit contre la bouche de Raya et fit en sorte qu'elle boive le liquide. Pendant ce temps, le loup inquiet lui léchait la joue.

Il n'y avait plus que quelques dauphins, des poissons, Rafiki et le loup. Les autres animaux étaient partis. Reno remarqua que Raya était mouillée, elle était allée dans l'eau pendant qu'il jouait de l'ocarina ? C'était l'hypothèse la plus plausible. Tout en faisant couler le liquide dans la bouche de la jeune fille, le garçon murmura :

" Réveillez-vous... "

[ HRP : Lady Biohazard ? J'ai l'impression que ton nom a été choisi au hasard... Et qu'il est bizarre... ]

Boom boom… boom boom…

Raya entendait le bruit saccadé de son cœur qui battait. Une chaleur inexplicable se propageait dans ses veines. Quelque chose clochait. En principe, quand on s’évanouit, on ne s’en rend pas vraiment compte. Elle le savait bien car cela lui était déjà arrivé plusieurs fois dans le passé. Là, c’était différent. Elle eut l’impression qu’une sorte de sous-partie d’elle était activée. Un peu comme lorsqu’on se réveille dans la nuit entre deux rêves et qu’on se demande si ce qu’on vit est réel ou pas. En fait c’était plus un cauchemar. Elle se sentait trembler et suer à grosses gouttes, comme atteinte d’une fièvre de niveau 4, alors que son vrai corps semblait dormir, paisiblement étendu sur le sable. Elle griffait le sol de ses ongles, s’agitait dans tous les sens, poussait des couinements, envahie par des picotements atroces, et tout ça sans véritablement bouger d’un pouce.

Quelque chose n’allait pas. Elle avait le cerveau broyé en compote, mais elle se rendit bien compte qu’il y avait une règle qu’elle avait enfreinte. Sinon, elle n’aurait pas à souffrir comme cela. Une odeur de viande fraiche vint titiller ses narines.

« J’ai faim… »
« Alors mange. »
« Je ne peux pas ! C’est mal. »
« Mais si, tu peux. Vas-y. Mange-les tous, comme tu l’as fait pour moi. »

Raya (ce qu’il en restait) sentit que quelqu’un dans le vrai monde réel lui ouvrait les dents avec fermeté, ce qui eut pour effet de l’énerver très violemment. Un liquide glissa le long de sa langue et de sa gorge. Un instant, un magnifique et merveilleux instant, elle fut presque certaine de pouvoir lécher du sang encore tiède sur ses lèvres.

« Réveillez-vous. »

C’était trop tentant. Sa respiration émettait maintenant un bruit plus proche de grognements qu’autre chose. Elle savait qu’elle allait bientôt craquer. Dans un ultime effort, qui dura pour elle au moins une heure de lutte acharnée, elle ouvrit les yeux. Des yeux vides, injectés de sang. Elle voyait des choses autour d’elle mais elle n’arrivait pas à les identifier. Entre deux convulsions, elle se redressa en position assise.

« J’ai froid… » gémit-elle.

Oui, bien sur, ca lui revenait. L’infirmerie. La pilule. Ou l’inverse. Ou alors… Non, ce n’était pas ca. Non, pour commencer, elle devait mordre a l’épaule l’adorable garçon qui se tenait près d’elle… ou non, commencer par lui arracher le cœur… oui, voila, c’était ce qu’il fallait faire. C’était ce qui était bon, selon la logique du bien et du mal. A moins que…

Le soleil l’aveuglait. Il faisait jour. Les choses n’étaient pas sensées se passer comme ca ! A force de négliger ses médicaments, la pauvre était complètement déréglée et elle savait que cela pouvait être très dangereux pour elle. Elle ne voulait pas se transformer, pas manger son premier ami à Kageshiro et surtout pas manger les petits lapins tous mignons. Ca, à la limite, c’était très peu probable. Sauf que si elle n’était pas soignée rapidement, elle risquait de mourir. Non ! Elle ne voulait pas mourir maintenant ! Elle ne pouvait mourir alors qu’un destin commençait tout juste à se profiler devant elle ! Elle aurait voulu faire quelque chose, appeler de l’aide, n’importe quoi, mais elle avait tellement mal qu’elle n’arrivait pas à aligner deux mots. Le seul moyen qu’elle trouva pour appeler au secours fut de hurler a la mort en pleurant comme un bébé. Encore une fois, elle fut désespérée de se rendre compte a quel point ce geste la rendait ridicule, mais c’était une question de vie ou de mort.

Invité

Une fois le fruit vide, Reno le posa dans le sable juste à côté d'eux. Il espéra que la jeune fille se réveille... Quelques secondes après, elle ouvrit les yeux. Mais elle avait quelque chose d'étrange, ses yeux étaient vides... Pouvait-elle encore voir ? Était-elle devenue aveugle ?

« J’ai froid… »

Sur ces mots, l'Elfe déboutonna sa chemise rapidement et la mit sur Raya. Il posa ses mains sur l'habit et frotta délicatement la jeune fille pour la réchauffer. Reno était loin de se douter que Raya pensait à une façon de le manger... Mais de toute façon, l'esprit de son père incarné dans le collier qui pendait autour de son cou était là pour le protéger. Le garçon l'ignorait, mais ce pendentif créer un bouclier pour le sauver contre un quelconque danger.

Les deux pensionnaires restèrent silencieux... Le soleil les réchauffait avec ses rayons de lumière et le vent chaud de la mer venait les caresser. L'Elfe le ressentait le mieux car il était torse nu...

Le loup s'éloigna légèrement et renifla la veste de Raya. Il introduisit son museau dans une des poches et en sortit une petite boîte qu'il emmena auprès du garçon. Celui-ci prit l'objet en demandant :

" Qu'est-ce que c'est ? "

Le loup répondit dans un petit aboiement :

" Je l'ai trouvée dans sa veste. "

Le singe observa ce que tenait Reno dans sa main et afficha un visage surpris en disant dans le langage des Humains.

" Ce médicament... Il est utilisé par les Loups-Garou pour ne pas se transformer... "

Cela voulait-il dire que Raya était une Loup-Garou ? Ça expliquerait son odeur si proche de celui des loups... Reno ouvrit rapidement la boîte et prit l'une des pilules. Lorsqu'il se retourna vers la jeune fille, il remarqua la présence de larmes qui coulaient sur son visage. L'Elfe mit l'une de ses mains derrière la tête de Raya pour lever un peu sa tête et positionna la pilule contre les lèvres de la jeune fille. Bien que la situation était grave, la voix du garçon restait douce et mélodieuse.

" Vous devez manger ça... Ouvrez la bouche s'il vous plait. "

« Vous devez manger ca… ouvrez la bouche s’il vous plait. »

Raya ne savait pas trop se qui se passait, mais elle ne pouvait rien faire de mieux pour arranger son cas. Ouvrir grand la bouche était une épreuve plus dure qu’elle ne l’aurait cru. Dès que ses yeux se refermaient, elle avait de nouveau l’impression que tout irait mieux si elle se contentait de manger la quantité avantageuse de nourriture qu’elle avait autour d’elle. A des moments, elle ne savait vraiment plus ou elle en était. La pilule tomba dans sa bouche. (Elle avait encore assez de discernement pour comprendre qu’il s’agissait de sa pilule adorée.) D’habitude, elle n’avait aucun mal à l’avaler sans eau, mais elle se rendit compte avec horreur que ses tremblements l’empêchaient d’avaler correctement. Avec désespoir, elle essaya de toutes ses forces de la croquer, sans succès. De nouveau, elle essaya d’avaler, mais ses échecs la firent pleurer de plus belle.

« Je n’y arrive pas ! »

Il fallait qu’elle ait du courage. Ce n’était pas en pleurant que les choses allaient s’arranger, bien au contraire. Elle serra les dents et repositionna le médicament correctement dans sa bouche. Une bonne vingtaine de larmes plus tard, elle réussit enfin a le faire rentrer dans sa gorge, non sans cracher ses tripes au passage.

Elle tremblait toujours et avait toujours la sensation d’avoir des aiguilles enfoncées dans ses muscles, mais sa vision avait l’air un peu plus claire. Elle n’eut pas la force de bouger la tête. Le ciel bleu azur parsemé de nuages coton s’animait au dessus d’elle. Le plus important, c’était que quelqu’un l’aidait. L’adorable petit loup était toujours là. Raya attrapa le bras de Reno et le serra fort. Il aurait très bien pu la laisser crever toute seule, or il était resté. Alors elle était heureuse, malgré son état. De toute façon, il n’avait pas le choix. Elle ne le laisserait pas partir.

« Il faut que je réussisse à bouger… » grinça-t-elle.

Invité

« Je n’y arrive pas ! »

Reno ne pouvait pas aider Raya à avaler cette pilule, tout était maintenant du ressort de la jeune fille. Le garçon voyait très bien le mal qu'elle avait et son cœur le pinça à chaque fois qu'une larme sortait des yeux de Raya.

Tout à coup, la jeune fille attrapa le bras du garçon et se mit à le serrer. Avait-elle réussi à avaler le médicament ?

« Il faut que je réussisse à bouger… »

Reno posa sa main qui était libre de mouvement sur celle de Raya qui tenait son bras et dit d'une voix douce qui se voulait réconfortante.

" Restez allongée, vous avez besoin de repos... "

Le loup se mit à lécher la joue de la jeune fille encore une fois. Il essuyait ainsi les traces de gouttes d'eau qui s'y trouvait. Rafiki chercha de l'eau et en transporta à l'aide d'une moitié du fruit. Il y déposa quelques petites plantes à effet curatives et l'apporta auprès de la jeune fille.

" Buvez, vous irez mieux après. "

Le singe mit le fruit en face de la bouche de la jeune fille et le pencha pour faire en sorte que le liquide sorte de son récipient vers ses lèvres. Ceci ne devait pas avoir mauvais goût, Rafiki était assez reconnu parmi les animaux pour savoir faire de très bons remèdes à base de plantes. C'est même lui qui enseigne ces rudiments à Reno qui continuait de tenir la main de Raya en espérant qu'elle se rétablisse...

Non, elle ne pouvait pas rester là à se reposer ! Elle ne pouvait pas rester la à rien faire. Qu’est-ce qui allait se passer si elle mourrait bêtement ici ? Elle n’avait même pas encore fait son testament ! Elle allait abandonner sa famille. Abandonner ce monde merveilleux. Sans même avoir eu le temps d’avoir pu atteindre le poids et la taille qu’elle visait pour quand elle serait adulte, sans même avoir pu sortir après 22 heures, sans même avoir pu faire des dérapages en voiture sur des dunes de sables, sans même avoir pu rencontrer l’amour de sa vie, sans même avoir pu sauter en parachute, sans même avoir pu atteindre les championnats nationaux de son sport fétiche, sans même avoir pu mettre une patate a un garçon de catégorie poids moyen ! Sa vie avait été un « total failure », une lamentable succession de « games over ». Son père avait toujours été gentil avec elle, trop gentil. Elle n’avait jamais été à la hauteur de ses espérances. Ses notes n’avaient jamais été assez bonnes pour qu’elle ait pu le rendre fier. Elle ne se rendit compte que maintenant à quel point il avait cédé à tous ses caprices, toujours avec le sourire, toujours avec douceur et amour. Elle ne se rendit compte que maintenant à quel point les hamburgers qu’il préparait (elle avait toujours prétendu que ceux de Mac Donald’s étaient meilleurs) étaient savoureux.

Brusquement, elle sentit une main douce et tiède se poser contre la sienne. Elle frissonna : à vrai dire elle ne s’attendait pas vraiment à ce qu’un garçon qui continuait à la vouvoyer après le lot d’actions qu’ils avaient plus ou moins vécu ensemble lui prenne la main comme s’ils étaient frères et sœurs. En plus, cela l’embêtait plus qu’autre chose parce qu’elle savait que s’il se montrait mignon comme ça elle, elle serait obligée de l’écouter s’il lui disait de se ménager. Parce qu’elle les voyait tous déjà venir avec leurs « Mais non, repose toi, tu vas te faire mal, reste couchée… ».

« Restez allongée, vous avez besoin de repos. »

Et voilà ! Comme par hasard. Cool. Zen. Il fallait qu’elle trouve un peu de méchanceté en elle pour lui dire de garder ses conseils pour lui. Elle était sur le point de refuser fermement quand le loup vint lui lécher la joue. Cela l’acheva, et elle craqua. D’un autre cote, il n’avait pas tord. Elle avait fait plusieurs centaines de kilomètres pour venir, dont une bonne dizaine à pieds avec ses affaires. Elle s’était levée à 6 heures pour être à 7 heures dans le premier train et avoir le temps de dire au revoir a son père. Toute la journée, elle n’avait cesse de courir de gare en gare. L’un des trains avait eu du retard, conséquence, elle avait loupé tous les autres et était arrivée plusieurs heures en retard. Elle était sensée être a 16 heures tapantes devant le pensionnat pour le check-in de sa chambre. L’heure réelle de son arrivée, elle n’en savait rien (elle s’était fait voler sa montre dans un train, et la seule chose qu’elle réussit à récupérer en se défendant fut une méchante griffure au bras et une gifle mémorable), mais en tout cas, il faisait déjà nuit depuis longtemps. Vraiment, ses jambes était engourdies, elle avait mal aux mollets à force de trop marcher et mal aux fesses a force de trop rester assise.

Le singe qui s’appelait Rafiki lui apporta quelque chose dans un récipient qui semblait provenir du fruit qu’ils lui avaient fait boire. Il parla d’un ton réconfortant, en lui disant qu’après avoir bu son contenu elle irait mieux. Elle ne sut pourquoi elle faisait confiance à un singe. Un singe qui parle et qui en plus est docteur ? Si elle n’était pas déjà KO, elle n’y aurait franchement pas cru. Peut être parce que cet étrange personnage lui disait vaguement quelque chose ? En tout cas, elle s’efforça d’avaler le liquide qu’il mettait dans sa bouche a petites gorgées maladroites. C’était une mixture étrange, comme de l’eau mais avec un gout qui ressemblait plus à une sorte de soda, à la fois acide et doux comme du citron sucré.

Le remède concocté par Rafiki ne tarda pas à faire son effet. La douleur s’estompa, mais elle avait la sensation désagréable qu’elle était endormie de partout, et qu’elle avait perdu l’usage de ses muscles, un peu comme si elle avait été mise sous sédatif. A part ca, elle se sentit beaucoup mieux, sa respiration avait pris un rythme un peu plus régulier et son pouls avait décéléré. Elle avait également retrouvé toutes ses facultés d’analyse et put se rendre compte un peu mieux de la situation. Elle vit le museau tout mignon du loup, Reno qui avait utilisé son haut pour la couvrir avec une petite lueur d’inquiétude dans ses yeux, et Rafiki qui lui parut encore plus bizarre qu’avant son évanouissement.

« Eh ben… on dirait que votre truc marche bien. » adressa-t-elle a Rafiki.
« C’était sûr. » répondit le singe multicolore en souriant. (Un singe qui sourit ? Oo)

Raya rit lamentablement d’une voix éraillée tant elle avait toussé et pleuré.

« C’est gentil de m’avoir mis ta chemise, mais c’était pas tres intelligent ! J’ai une veste qui tient chaud ! » fit-elle remarquer à Reno.

Elle éclata de son horrible rire d’ultra-fumeuse-compulsive. Les secousses de sa poitrine la firent tousser de nouveau, et elle rit encore plus. Le loup mit ses pattes sur la chemise blanche et elle le serra contre elle tendrement comme elle l’aurait fait pour une peluche. Comme il appuyait sur son ventre, elle se rendit compte qu’elle avait toujours faim.

« Quelle heure il est au fait ? Mon portable doit être déchargé… »

Elle poussa un juron en se disant que son père devait être en train de se ronger au sang et qu’elle ne saurait pas du tout quoi lui répondre quand il lui demanderait des explications.

[HRP : J’viens de me rendre compte que y’a pas d’infirmerie à Kageshiro ! C’est affreux ! Comment on fait si on tombe malade ? J’écrirai ça dans les suggestions demain. =)]

Invité

La potion du singe avait l'air de fonctionner car la respiration de Raya n'était plus si audible. Elle redevenait normale et les larmes cessèrent de sortir de ses yeux.

« Eh ben… on dirait que votre truc marche bien. »

« C’était sûr. »

Rafiki sourit pendant que la jeune fille se mit à rire. Sa voix n'était pas tout à fait en forme, mais elle arrivait à parler correctement.

C’est gentil de m’avoir mis ta chemise, mais c’était pas très intelligent ! J’ai une veste qui tient chaud ! »

Elle s'adressa enfin à l'Elfe qui tenait toujours sa main dans la sienne. Mais celui-ci ne répondit pas, il était content qu'elle aille bien. Reno ne voulait pas voir quelqu'un mourir sous ses yeux, c'était déjà assez douloureux de perdre sa famille... En tout cas, c'est vrai que la veste aurait été plus efficace. Mais le garçon n'allait pas la laisser pour chercher sa veste posée dans le sable un peu plus loin. Et puis, si Raya n'avait pas sauté dans la mer, elle n'aurait pas eu si froid...

Tout le monde restaient silencieux. Seul le rire entrecoupé d'éternuement demeurait dans les airs. Le loup posa ses pattes avant sur la jeune fille qui le serra contre elle. Puis, elle poussa un juron.

« Quelle heure il est au fait ? Mon portable doit être déchargé… »

Reno ne comprit pas pourquoi elle avait réagi ainsi en demandant l'heure. Avait-elle un rendez-vous ? Voulait-elle partir le plus rapidement possible ? En tout cas, l'Elfe leva la tête vers le ciel et observa la position du soleil en disant :

" Il est... 18 heures 34. "

Le garçon baissa son regard vers le visage de Raya et demanda :

" Pourquoi ? "

[ HRP : Si tu veux faire un sujet dans une infirmerie à l'intérieur du pensionnat, tu peux poster dans "autre" qui se trouve à l'intérieur du bâtiment. Ceux qui y postent peuvent choisir le lieu au choix, comme le toit, une serre, une infirmerie... ]

« 18 heures 34. Pourquoi ? »

Quoi ? Déjà ? Mais alors que faisait elle ici a semi-agoniser sur une plage en papotant tranquillement avec un elfe et des animaux ? Quelle crétine ! Etait-elle donc égoïste ?

Raya essaya de se redresser, ce qu’elle réussit à faire avec des fourmis dans le dos. Elle dégagea le pauvre loup sur le côté comme une vulgaire peluche et rendit son vêtement à Reno. Son visage se secoua frénétiquement de gauche à droite. Une nuée de grains de sables partit de ses cheveux. Elle regarda ses poignets : les deux élastiques qu’elle avait utilisés pour nouer ses cheveux étaient toujours sur elle et son harmonica luisait sous le soleil à côté d’elle. Tout en s’agitant, elle chercha le moyen d’expliquer la situation le plus clairement possible sans devenir agressive.

« Comment dire… disons qu’on m’a confié une mission. Je dois retourner à Kageshiro. En plus, j’ai oublié ma malle dans le hall. »

Elle se sentait stupide. Elle n’aurait jamais du accepter d’être amenée sur cette plage paumée au milieu de nulle part. Elle avait la sensation horrible qui surgissait quand elle venait de faire une bêtise. Maintenant, elle n’avait aucune idée de comment elle s’y prendrait pour rentrer. Elle devrait probablement demander à se faire raccompagner, mais comment était-elle sensée demander ça ? Il n’avait probablement pas que ça à faire. Et s’il refusait elle aurait l’air bien intelligente, une fois de plus. Apres tout, tout cela était de sa faute. Depuis le début. Vraiment, qu’est-ce qu’elle était idiote ! La confusion de ses pensées et la timidité qu’elle refusait d’admettre comme étant un de ses traits les plus envahissants la firent rosir un peu.

Elle était déjà debout, en train de rassembler ses affaires. En calculant, elle vint a l’affreuse conclusion que son père n’avait pas eu de nouvelles d’elle, qu’elle n’avait pas pris de douche, qu’elle n’avait pas mangé un vrai repas consistant, depuis bien 24 heures. Sa tête contenait a lui faire mal bien sûr, mais le remède à base de plantes de Rafiki avait été d’une intensité suffisamment efficace pour que la douleur ne soit plus gênante. Son regard se posait vers Tico le griffon qui était toujours là. Elle ne savait pas si elle pourrait supporter un deuxième voyage de ce type. Non. Elle allait le laisser à Reno, comme ça s’il avait envie de rester sur la plage il ne serait pas obligé de l’accompagner. Quand à elle, elle finirait bien par retrouver le pensionnat. Au pire elle ferait de l’auto-stop.

Quelle galère… quelle galère ! Pourquoi fallait-il toujours qu’elle aille se mettre dans les pires embrouilles ? Elle aurait voulu passer plus de temps à marmonner au soleil en écoutant le bruit des vagues , mais elle était déjà prête à partir, et elle avait la ferme conviction qu’il fallait qu’elle respecte son devoir, à commencer par réparer son erreur au plus vite.

« Je suis vraiment désolée de casser l’ambiance. Je suis contente de tous vous avoir rencontrés… »

Elle avait dit ca en se rappelant à quel point faire la connaissance de Rafiki avait été bizarre. Elle aurait bien voulu sourire, faire quelque chose pour témoigner a Reno l’affection qu’elle espérait avoir pour lui, mais elle se donna une bonne raison de ne pas le faire en se disant que ce ne serait pas très gentil pour les autres. Des animaux ! Si ça ce n’était pas de la mauvaise foi…

Elle finit ses adieux avec un « Merci pour tout » théâtral, et tourna les talons. Mais c’était beaucoup trop dur de simplement partir. Trop dur pour tout ce qu’elle venait de vivre. Aussi, une petite fraction de seconde, elle savoura la poésie du moment.

Invité

Le comportement de la jeune fille changea, c'était à peine si elle paniquait. Elle éloigna le loup d'une telle façon qu'il fut surpris et se demanda s'il avait fait quelque chose de mal. Puis elle rendit l'habit à l'Elfe qui le tenait entre ses mains en se demandant ce qui se passait.

« Comment dire… disons qu’on m’a confié une mission. Je dois retourner à Kageshiro. En plus, j’ai oublié ma malle dans le hall. »

Raya se leva et chercha ses affaires éparpillées un peu partout dans le sable tandis que Reno restait assis à la regarder sans rien dire. Elle avait changeait si rapidement que le garçon était encore au stade de demander ce qui arrivait.

« Je suis vraiment désolée de casser l’ambiance. Je suis contente de tous vous avoir rencontrés… »

Aucun animal ni l'Elfe ne s'étaient déplacés. Ce n'est qu'une fois que Raya tourna le dos à eux que Reno se leva. Il laissa tomber la chemise au sol et agrippa le bras de la jeune fille en murmurant.

" Tu... pars ? "

On pouvait voir le poids de la solitude du garçon à travers ses yeux bleus. La même couleur que la mer qui était la seule chose que l'on voyait à l'horizon. Reno avait de nombreux amis animaux. Mais son cœur porte un fardeau car il n'a pas vraiment d'amis Humains... Même en étant dans un pensionnat où se trouve des personnes qui nous ressemble, être avec nos sosies et parler avec eux est différent... Reno ne veut plus être seul, il ne veut plus souffrir de ça, il ne veut plus vivre dans l'obscurité...

Elle allait faire le premier pas qui entamerait une longue marche errante et désespérée quand il se saisit de son bras et la retint. Avec tout ca, elle avait oublié qu’il était probablement plus fort qu’elle et dans un éclair de frayeur, elle eut l’impression qu’elle venait de s’être fait kidnapper et qu’à présent elle ne pourrait plus s’échapper.

" Tu... pars ? "

...

Il faisait vraiment pitié. Vraiment. Sa voix tremblait, il agrippait son bras dans la position typique des gens au bout du rouleau qui s’accrochent misérablement à leur dernier espoir de sociabilité. Bien sur qu’elle allait partir ! Cela ne semblait-il pas évident, étant donné ses dernières paroles et la façon bien claire dont elle commençait à partir ? A cet instant, elle ne sut pourquoi elle se retenait de faire volte-face et de lui mettre une baffe. Que faisait-il dans ses pattes ? Elle s’était retournée calmement en priant qu’il ne vienne pas lui parler de la dette qu’elle avait envers lui. D’ailleurs, elle n’avait pas la moindre dette envers lui !

Ses yeux heurtèrent les siens. Le fait qu’il les ait bleus les rendait particulièrement impénétrables mais en les croisant, une évidence lui apparut comme un flash sans qu’elle ne comprenne ce qui lui arrivait. Evidemment ! Ce type avait la phobie de la solitude. Bien sur, il avait tous ses petits amis les animaux (d’ailleurs, elle avait retrouvé qui Reno lui rappelait : Blanche-Neige qui chantait avec son adorable faon), mais entre personnes sur deux pattes qui parlent un même langage (un loup garou et un elfe… pouvait on vraiment parler d’humanité ?), il était normal de mieux se comprendre.

D’un seul coup, elle s’en voulut énormément de toutes les méchancetés qu’elle avait pensées de lui. Son cœur se serra à l’idée qu’il puisse être triste à cause d’elle et elle paniqua car elle crut qu’il allait pleurer de nouveau. Elle lui prit la main tendrement, un peu comme il l’avait fait quand elle était encore souffrante.

« Eh ! Heeeey… Ressaisis-toi, s’il te plait… » murmura-t-elle.

Elle ne savait quoi lui dire qui pourrait répondre à ses attentes. Tout en essayant de le rassurer, elle glissait son pouce sur le dos de sa main comme avait l’habitude de lui faire sa meilleure amie. Cette époque lui parut démesurément lointaine, et le retour en arrière vertigineux que lui imposa ce geste fit qu’elle ne put retenir une petite larme sur sa joue déjà trop humide.

«Je DOIS y aller… je ne sais pas si tu peux comprendre. Il y a quelqu’un que je ne dois pas décevoir… »

Elle espérait ne pas trop s’étendre sur ses ambitions personnelles. Elle avait déjà assez raconte sa vie pour la journée. Elle déglutit devant la guimauve qu’elle s’apprêtait à lui sortir et baissa encore le ton de sa voix pour que personne d’autre ne puisse l’entendre, et surtout pas elle.

« Je voudrais que tu m’aides, s’il te plait… »

Elle se laissa tomber sur ses épaules et le serra fort dans ses bras. Son dos était chaud à cause du soleil et ce fut la douceur de sa peau qui la firent réaliser qu’il était toujours torse nu. Elle fut un peu gênée car elle ne savait pas si c’était très poli d’enlacer quelqu’un dans ces conditions. De toute façon, pourquoi s’embêtait-elle avec ça ? Qu’elle le sache, il était assez grand pour s’habiller tout seul.

Qu’est-ce qu’il croyait ? Elle non plus ne voulait pas être toute seule ! Elle n’était pas parfaite, loin de là, et depuis leur première rencontre elle n’avait fait que lui montrer à quel point il était secourable envers elle.

Invité

La jeune fille se tourna vers le garçon et lui prit la main. Ceci réchauffa légèrement son cœur, c'était la première fois depuis longtemps qu'on lui tenait ainsi la main... En faite, on lui prenait habituellement la main pour le tirer et l'enfermer dans une armoire lorsqu'il était dans un orphelinat. C'était aussi pour ce genre de traitement qu'il avait fui ces établissements et qu'il a vécu dans la rue. Tout en tenant sa main, la jeune fille prit la parole.

« Eh ! Heeeey… Ressaisis-toi, s’il te plait… »

Reno ne comprit pas pourquoi elle lui répondit cela. C'était vrai qu'il était plutôt triste à cause du poids que porte son cœur depuis si longtemps, mais son corps le montrait autant ? De plus, il était presque sûr d'avoir remarqué une larme sortir de l'œil de Raya. Et c'était à lui de se ressaisir ?

«Je DOIS y aller… je ne sais pas si tu peux comprendre. Il y a quelqu’un que je ne dois pas décevoir… »

Pourquoi était-elle obligée de partir ? De qui parlait-elle ? Pourquoi ne devait-elle pas le décevoir ? Voici ce que se demandait l'Elfe... Mais il ne connaissait rien aux obligations et aux devoirs que l'on pouvait avoir. Ce qui est compréhensible, comment peut-on apprendre ça sans famille ? Reno voulut poser des questions lorsque la jeune fille murmura quelque chose.

« Je voudrais que tu m’aides, s’il te plait… »

Raya venait de parler à voix très basse. Mais malheureusement pour elle, l'ouïe des Elfes est meilleure que celle des Humains. Reno avait donc compris ce qu'elle venait de dire. Mais, avant qu'il n'ait eu le temps de faire quoi que ce soit, il se trouva collé à elle. Ce geste le surprit quelques peu, il n'avait pas vraiment l'habitude d'être si proche de quelqu'un... Et surtout d'une fille. Le garçon sentait les mains de la jeune fille sur son dos, ce qui fit légèrement frissonner.

Reno ne savait pas vraiment quoi faire, il était encore sur le coup de la surprise. Mais ses bras s'approchèrent peu à peu de Raya pour la serrer d'avantage contre lui.

Après plusieurs secondes, Reno décida de murmurer quelque chose à l'oreille de la jeune fille tout en restant contre elle.

" Si je t'aide... Ne me laisse pas... "

On pouvait dire que c'était du chantage, donnant-donnant ou une proposition... Mais cela ressemblait plutôt à un souhait bien que sa voix ne trahissait pas ses sentiments.

Les animaux ne faisaient que regarder la scène sans rien faire, ils ne pouvaient même pas entendre leurs paroles qui étaient prononcés à un volume trop bas.

Raya reposait paisiblement sa tête lancée de vertiges sur l’épaule de Reno. Il sentait bon la pluie tropicale, du coup, frotter sa joue contre son cou la rassurait et lui réchauffait de cœur. Sans qu’elle ne s’y attende, le garçon entoura sa taille avec ses bras et la resserra contre lui. Elle fut surprise par ce geste.
...Peut être qu’il l’aimait bien ! (Elle sourit, cachée derrière son bras et l’épaule de Reno)
...Peut être qu’il acceptait de l’aider ! (Elle re-sourit, faisant plus d’effort pour cacher ses dents qui commençaient à apparaitre entre ses lèvres.) Il ne parlait pas beaucoup, mais elle n’avait pas pu s’empêcher de remarquer qu’il l’avait tutoyée pour la première fois depuis leur rencontre.

Plusieurs secondes s’écoulèrent pendant lesquelles Raya se contentait d’être sereine et heureuse. La mer continuait ses clapotis discrets. La voix de Reno la fit presque sursauter tellement elle était détendue. Elle aurait probablement pu s’endormir sur son épaule s’il n’avait pas dit :

" Si je t'aide... Ne me laisse pas... "

C’était quoi cette réplique tirée d’un film slasher ? Bon, d’accord. Ces références cinématographiques n’étaient pas très exemplaires, et elle s’emballait un peu trop vite dans sa paranoïa. Mais bon, dans un film normal, ce genre de scène aurait été typiquement celle ou elle aurait pensé très fort dans sa tête : ce n’est pas plausible.

C’était plutôt effrayant. Ce genre d’engagement ne lui plaisait pas du tout. Depuis qu’elle était toute petite, elle fuyait ce genre de dépendance aux personnes. Elle avait toujours été une enfant de type indépendante. Elle prit beaucoup de temps avant de répondre quoi que ce soit.

Mais de toute façon, elle ne le laisserait pas. D’une certaine manière, ils étaient déjà liés à vie. Raya faisait partie des gens qui pensent que quand on prend la main d’une personne, on tisse un lien qui unit les deux personnes a jamais. C’était symbolique. Il l’avait aidée, c’était a elle d’en faire de même. Elle n’avait pas le choix.

D’un autre cote, être proche de quelqu’un lui faisait plaisir. Cela lui rappelait plein de bons souvenirs. Il fallait bien qu’elle recommence a essayer de se faire des amis de nouveaux. Rentrer dans une meute. Avoir une famille. Elle ferma les yeux et essaya de toucher ce bonheur qui était déjà quasiment entre ses doigts.

Elle se sentait vraiment proche de lui. Enfin, pas que physiquement, quoi. Elle se sentait prête à lui faire confiance. Un instant, son imagination délirante partit sur une hypothèse comme quoi ils seraient en fait frères et sœurs. Il aurait été son frère ainé (Raya ne connaissait pas exactement son âge, mais elle supposa qu’il était un peu plus vieux qu’elle), mais comme il n’aurait pas été loup garou, ses parents, pour le protéger, l’auraient confié a des parents éloignés, et lui auraient caché son existence. Elle pensa qu’il serait merveilleux que ce soit la vérité.

Elle se détacha de l’étreinte de Reno et le regarda droit dans les yeux en le tenant fermement par les épaules. Et la, bien fort, elle annonça :

« Je t’abandonnerai jamais ! Toi et moi c'est pour la vie! »

Elle était contente de cette phrase. Une phrase magnifique. Une phrase qui aurait pu figurer dans un slasher, pourquoi pas ?

Invité

Le visage de Raya touchait le cou du garçon. Cet endroit est plutôt sensible et provoque souvent un frissonnement de toute le corps au touché. Et c'est ce qui se passait de temps en temps avec Reno. Ce qui est tout à fait normal lorsqu'on a pas l'habitude d'être avec des personnes...

L'Elfe avait posé sa sorte de condition, ou plutôt son souhait. Ils étaient tout deux collés l'un à l'autre et le silence commençait à peser un peu sur le garçon.Tout et n'importe quoi traversait son esprit. Allait-elle le haïr de profiter de la situation ? Allait-elle l'insulter ? Ou bien allait-elle accepter ? Reno ne pouvait le savoir, il ne pouvait même pas voir l'expression qu'affichait le visage de Raya car elle était collée contre lui.

Le garçon attendait donc avec cette pression au-dessus de sa tête sans rien dire. Au bout d'un moment, la jeune fille se détacha de l'étreinte de l'Elfe. Celui-ci la laissait faire en se demandant ce qui allait se passer... Les mains de la Loup-Garou se posèrent sur ses épaules et son regard plongeait dans le sien. L'imagination de Reno inventait plusieurs scénarios, c'est incroyable à quelle vitesse un cerveau peut tourner lorsqu'il est entrain de stresser. Elle le tenait fermement par les épaules, peut-être pour qu'il ne puisse pas s'échapper... Son regard si intense était peut-être remplis de haine... La pression montait rapidement dans le corps du garçon qui vit la bouche de la jeune fille s'ouvrir.

« Je t’abandonnerai jamais ! Toi et moi c'est pour la vie! »

Reno n'en crut pas ses oreilles. Il se demanda d'abord s'il avait mal entendu, puis si elle ne mentait pas... Décidément, le cerveau d'une personne vivant dans la solitude n'arrive pas à imaginer une scène positive... Mais dans tous les cas, son cœur fit sortir une larme par l'un de ses yeux. Pas de tristesse, au contraire. Il était heureux. Mais, allait-elle tenir son serment ? Raya avait prononcé ces paroles d'une voix forte. Les animaux des alentours entendirent aussi ce qu'elle venait de dire. La plupart d'entre eux sourirent, d'autres pensèrent que ce genre de promesse ne se tiennent jamais éternellement... Reno étant toujours seul, il avait aussi la naïveté d'un petit enfant sur ce genre de chose. Donc son esprit n'effleura pas l'idée qu'elle ne tienne pas sa promesse. Mais il voulut être certain que c'était bel et bien un serment. Sa bouche s'ouvrit mais les émotions qu'il ressentait empêchait sa voix d'être normale.

" Pro...mis ? "

Reno n'avait pas bougé, les mains de Raya étaient toujours sur ses épaules dénudées que le soleil éclairait. Heureusement pour lui qu'il n'était pas mouillé car le vent de la mer l'aurait rapidement rafraichit. Ce vent était le plus ressenti sur son visage à cause des larmes qui coulaient sur ses joues...

Raya se demandait si elle n’avait pas fait une gaffe en prononçant ces derniers mots. Le garçon sembla aussi étonné que si on venait de lui annoncer qu’il était une dame de 40 ans, qu’il avait trois enfants et qu’il était millionnaire. Elle avait l’impression qu’il s’était mis à frémir et que son cœur venait de faire un bond dans sa poitrine.

Elle pencha légèrement sa tête sur le côté par un reflexe incontrôlé. Elle ne savait pas vraiment ce qui allait se passer. Il l’avait probablement trouvée tout simplement ridicule ! Qui pouvait être assez bête pour faire un serment d’amitié à quelqu’un que l’on ne connait que depuis quelques heures, en d’autres termes, que l’on ne connaît pas ? Maintenant, il devait peut être la considérer comme une pauvre… oh non. Elle préférait ne pas y penser. Raya avait tout essayé pour enfin s’arrêter de se préoccuper du regard des autres- ou plutôt de Reno dans ce cas précis, mais il était si stressant que… Rhaah non ! Ce n’était pas de sa faute ! Pourquoi fallait-il toujours qu’elle rejette ses propres défauts sur les autres ? Tout ce qu’il lui restait à faire c’était de se taire et d’assumer sa réaction, qui serait majoritairement catastrophique d’après l’énormité qu’elle avait sortie ce coup là. Elle n’avait jamais été douée pour les rapports sociaux, mais là, c’était le pompon.

Avec horreur, Raya vit que des larmes recommençaient a envahir les yeux du pauvre elfe. Elle s’agita dans un spasme et s’apprêtait à se mettre a genou pour le supplier de ne pas pleurer de nouveau quand il mit fin à ses doutes.

" Pro...mis ? "

Elle soupira. Si ce n’était que ca, elle pouvait encore s’en sortir. Mais comment pouvait-elle lui prouver son devouement envers lui ? Elle inspirait si peu confiance ? Dans d’autres conditions, elle lui aurait offert un cadeau ou lui aurait préparé des biscuits. Mais c’était maintenant qu’il fallait agir. D’ailleurs, si seulement elle avait été un peu plus perverse, elle aurait tout fait pour raccourcir la chose et partir au plus vite. Mais certaines choses demandent du temps, et elle était bien placée pour le savoir.

« Je te promets que je ne te laisserai jamais. Juré, craché. »

Elle s’apprêtait à cracher sur le sable, mais elle se souvint que cette attitude n’était pas très convenable pour une jeune fille bien élevée, et qu’elle avait été envoyée ici par son père justement pour corriger les habitudes de ce type.

Et d’un seul coup, comme dans une pulsion, elle fit une action qu’elle ne put s’empêcher de redouter.

« Tu sais quoi ? Tiens. Voila la preuve que je ne pourrai pas t’abandonner. »

Elle avait ressorti l’harmonica de sa poche et le tendait à Reno dans un acte proche du suicide. Mais c’était ca aussi l’amour. Le sacrifice d’une partie de soi pour parler euphémiquement, ou alors une longue série de suicides plus ou moins utiles. C’était son opinion depuis déjà plus d’un an.

« J’y tiens beaucoup, expliqua-t-elle. Comme ca si je te trahis, je trahis aussi un peu de moi-même. »

Elle se força à sourire sachant pertinemment que ce qu’elle faisait l’engageait dans un chemin long et dangereux. Elle avait un peu peur, et elle espérait qu’il serait compréhensif avec elle et qu’il ne la laisserait pas tomber non plus.

Invité

A la question du garçon, Raya soupira. Comme si cette situation l'ennuyait, trouvait-elle Reno lassant ? A moins que ce ne soit un soupir de soulagement.

« Je te promets que je ne te laisserai jamais. Juré, craché. »

Elle a bel et bien promis de ne pas l'abandonner. Mais il y avait tout de même une chose que Reno n'avait pas compris, pourquoi avait-elle dit craché ? Ayant l'habitude d'être seul, l'Elfe ne peut apprendre les expressions qu'utilisent habituellement les personnes entre eux. De plus, Raya ne cracha pas ce qui donna l'impression au garçon qu'elle mentait. Mais il n'eut pas le temps de prendre la parole que la voix de la Loup-Garou retentit une nouvelle fois dans les airs.

« Tu sais quoi ? Tiens. Voila la preuve que je ne pourrai pas t’abandonner. »

La main de la jeune fille se gliça dans sa poche avant de la ressortir avec un objet qu'elle tendit vers le garçon. D'après ces mots, c'était la preuve qu'elle ne le laissera pas tomber.

« J’y tiens beaucoup, expliqua-t-elle. Comme ca si je te trahis, je trahis aussi un peu de moi-même. »

Lentement, Reno approcha sa main de l'instrument de musique et le prit. Il le regarda un moment et se demanda s'il cet objet était si précieux pour elle que l'ocarina ou la croix pour lui. Quelle signification peut bien avoir l'harmonica ? L'Elfe le plaça sur sa ceinture, juste à côté de l'ocarina. Il avait maintenant trois objets dont il devait faire attention : la croix qui pendait sur son torse, l'ocarina et l'harmonica attachés à sa ceinture.

Pour mieux comprendre ce que venait de dire Raya, le garçon préféra connaître la raison de l'importance de cet instrument de musique.

" Pourquoi est-ce une partie de toi-même ? "

L'émotion étant un peu passé, les larmes qui sortaient des yeux du garçon cessèrent peu à peu de couler jusqu'à ce que ses pleurs s'arrêtent totalement mais son visage restait humide. Son regard fixait le visage de Raya en attente d'une réponse.

" Pourquoi est-ce une partie de toi-même ? "

Raya détourna le regard et sourit en rougissant légèrement. Il n’allait pas la laisser s’en tirer comme ca, hein ? Pourquoi cet objet était-il si important pour elle ? Bonne question. Elle l’avait toujours gardé auprès d’elle, même pour dormir.

Décontenancée, elle tourna le dos et fit mine d’aller chercher des baies dans les buissons environnants –enfin, ce n’était qu’un demi prétexte car elle mourait vraiment de faim.

Une douleur indescriptible saisit son cœur et se propagea dans sa poitrine et jusqu'à son ventre. Bien sûr qu’elle savait pourquoi il faisait partie d’elle. Depuis pas si longtemps d’ailleurs, elle avait compris la nature de cet attachement. Le pire c’est qu’elle avait vraiment cet instrument dans les tripes, et même pas seulement au sens figuré.

-Cet harmonica, il appartenait à ma mère…

Elle avait toujours été décrite comme une femme merveilleuse, très belle, très douce et extrêmement gentille. Bref tout l’inverse de Raya.

Les choses n’auraient pas du se passer ainsi. Les bébés loup-garou ne sont pas sensés se transformer avant leur naissance, c’est ce que disait et répétait le monsieur dans sa blouse blanche tandis que sa mère agonisait, se plaignant tous les mois de douleurs atroces, crachant le sang, maigrissant spectaculairement de jours en jours. Quand les médecins se décidèrent enfin à intervenir par césarienne, il était déjà bien trop tard, et l’opération tua la petite maman sur le coup.

Raya avait beau se dire qu’elle n’avait rien choisit de tout cela, elle restait irrémédiablement convaincue que la faute lui revenait, qu’elle n’aurait jamais du exister, qu’elle avait été ce qu’on appelle une erreur divine. Elle se haïssait plus que tout. Elle était pire qu’un loup, pire qu’une bête, pire qu’un monstre, pire qu’un démon. Elle était l’incarnation même du mal et de la destruction. Dans sa tête, ca se passait comme ca. Le souvenir de sa composition génétique raviva en elle une rage telle qu’elle crut qu’elle allait exploser les baies qu’elle avait ramassées dans son poing, mais elle réussit à se contrôler de manière assez satisfaisante. La présence de Reno, des animaux et de la mer étaient un peu apaisantes. Toute cette colère comprimée et ravalée piquait atrocement les yeux, mais elle ne pleurerait pas. Elle avait déjà montré suffisamment de larmes devant ce garçon.

Comment expliquer ca simplement et sans choquer ? N’importe qui serait choqué de savoir qu’elle avait tué sa mère a l’âge de -2 mois en lui bouffant les entrailles ! Et puis zut ! Il était son ami, oui ou non ? Il avait le droit de savoir les choses telles qu’elles étaient, qu’il était en train de faire d’une cannibale son amie. Il fallait qu’elle se débarrasse de cet épineux problème une bonne fois pour tout. En serrant les dents, elle remonta ses yeux à hauteur de ceux de son interlocuteur.

« … et ma mère je l’ai mangée. Voila. Donc fais-y gaffe, s’il te plait. »

[HRP : Presque trois semaine pour pondre CA ? C’est impardonnable, je sais, désolée…]

Invité

Après la question du garçon, le teint de la jeune fille se rougit et puis elle tourna le dos à l'Elfe qui avait eu le temps d'observer son visage. Raya s'éloigna vers des buissons porteur de fruits et commença à se servir. Ignorait-elle Reno ? Avait-il dit quelque chose de mal ? Pourtant, il avait bien vu un sourire sur ses lèvres avant qu'elle ne se retourne. Avait-il dit quelques chose de gênant ? Avait-il poser une question qui lui rappelait de bons souvenirs ? Le silence s'était installé pendant sa cueillette. En regardant toujours à l'opposé du garçon, elle brisa le silence sans prévenir et sa voix fit légèrement sursauter l'Elfe qui était en train de méditer.

-Cet harmonica, il appartenait à ma mère…

Elle avait conjugué son verbe au passé, sa mère le lui avait donc donné ? Qui pouvait savoir, à part elle... Mais Reno crut apercevoir un léger mouvement au niveau du poignet de la Loup-Garou. Elle serrait son poing, ce qui était mauvais signe. Ce geste prouvait soit un énervement soit une anxiété... Mais, l'Elfe ayant pour habitude d'être toujours seul ne savait pas lire ce que le corps montrait de l'esprit...

Lentement, le regard de Raya croisa celui de Reno qui ne savait toujours pas quoi faire. La voix de la jeune fille retentit une nouvelle fois pour venir percuter les oreilles du garçon.

« … et ma mère je l’ai mangée. Voila. Donc fais-y gaffe, s’il te plait. »

Elle a mangeait sa mère... Mais elle n'a sûrement pas fait exprès. Elle a dû l'avoir fait contre son grès. L'Elfe connait très bien les blessures que produit le manque d'une famille et il ne peut donc s'imaginer que quelqu'un se débarrasse volontairement de sa famille. La Loup-Garou était un peu comme l'Elfe, elle n'avait plus de mère... Cette pensée remplit un peu ses yeux de tristesse, et non de colère. Sans s'en rendre compte, son subconscient posa une question à laquelle songeait son esprit.

" As-tu toujours un père ? "

Ce n'est qu'après qu'il remarqua ce qui venait de sortir de sa bouche et il le regretta en repensant ce qu'avait fait sa précédente question. Rafiki, le singe, poussa légèrement Reno en avant comme pour lui indiquer de rejoindre Raya. Ses jambes continuèrent d'avancer, comme si elles avaient compris ce que voulait Rafiki. Doucement, il s'approcha de la jeune fille en continuant de regarder son visage.

Son cœur meurtri était comme touché par les mots de la Loup-Garou et dictait à son corps ce qu'il devait faire. Une fois en face de Raya, il passa ses bras autour d'elle et la serra contre lui. De sa bouche sortit de petits murmures qui cherchaient les oreilles de la jeune fille.

" J'en prendrai soin... Et bien que j'ignore combien je compte à tes yeux, je suis là... "

" As-tu toujours un père ? "

Une évidence traversa la jeune fille. Même si le fait d’avoir tué sa mère l’avait rendue triste, il lui restait toujours papa Ichigaya qui serait toujours la pour elle. Il y avait pire qu’elle. Reno par exemple n’avait peut être plus de parents tout court, comme au moins une bonne moitie des âmes perdues errant dans les couloirs de Kageshiro.

-Oui, heureusement j’ai toujours mon père et je suis consciente que c’est une grande chance.

Rafiki poussa légèrement son ami vers la jeune fille et il s’avança pour l’étreindre dans ses bras. Elle ne voulait pas paraitre comme un oisillon à protéger, mais elle se laissa quand même faire.

" J'en prendrai soin... Et bien que j'ignore combien je compte à tes yeux, je suis là... "

Ces dernières paroles agirent sur son système nerveux comme un coup de jus, et pas des moindres. L’émotion de pouvoir se reposer sur quelqu’un, le dégout qu’elle avait d’elle-même et la faim combinés exécutèrent sur son corps une sorte de réaction en chaine qu’elle n’eut pas le temps d’anticiper. Comme si Reno avait la peau brulante comme du souffre, Raya se dégagea sauvagement de son étreinte et recula de deux pas.

-Je… je ne me sens pas bien…

Elle sentit qu’un liquide brulait ses poumons et compris. Elle eut le temps de faire volte-face et de sprinter le plus vite qu’elle put plus loin sur la plage. Une fois à bonne distance elle se cacha derrière un rocher et vomit avec peine la bile et les quelques résidus de pilule que son estomac avait méprisamment rejetés. Ce fut long, fatiguant et douloureux, et quand le supplice s’arrêta enfin, elle avait les yeux pleins de larmes et elle était essoufflée. Rouge de honte elle sortit maladroitement de sa petite cachette rocher après s’être essuyé la bouille sur le dos de sa main. Les chandelles tournaient autour de sa tête mais le vent marin la maintenait éveillée. Elle aurait bien voulu revenir et s’excuser auprès de son interlocuteur, lui dire que ce n’était pas sa faute, qu’elle était fragile et juste un peu fatiguée, mais elle ne pouvait s’y résoudre, c’était tout simplement impardonnable et surtout très offensant pour la personne. Elle resta donc sur place, se balançant d’un pied sur l’autre, en regardant par terre dans une attitude de soumission. Une façon d’agir bien trop proche de celle d’un loup à son gout, mais c’était tellement ancré dans sa manière d’être et depuis si longtemps qu’elle ne pouvait pas se défaire si facilement de cette petite manie. En tout cas, pas en deux ou trois secondes, et ce n’était pas le moment de s’entrainer a ca maintenant.

Invité

-Oui, heureusement j’ai toujours mon père et je suis consciente que c’est une grande chance.

Elle même avoua que c'était une grande chance, et elle avait raison. Reno donnerait tout pour revoir sa famille, pour pouvoir savoir ce que signifie le mot famille... Raya, elle, a encore une moitié de famille...

Le garçon serrait la jeune fille contre lui jusqu'au moment où elle se dégagea violemment. Raya recula de quelques pas et Reno la regardait d'un air incrédule.

-Je… je ne me sens pas bien…

L'Elfe n'eut pas le temps de demander des précisions qu'elle était déjà en train de courir pour quitter la plage. Reno la suivit du regard jusqu'à ce qu'elle disparaisse de son champ de vision. Quelques larmes parurent sur le visage du garçon qui pensait qu'elle était dégoutée de lui ou quoi que ce soit du genre. Il tourna le dos à la direction que Raya venait de prendre, baissa la tête et ferma les yeux pour pleurer silencieusement.

Il resta ainsi quelques instant jusqu'à ce que le singe le rejoigne et prenne la parole.

" Cesse de pleurer et suit la pour savoir ce qu'elle a. "

Reno releva un peu la tête pour voir Rafiki, les larmes toujours coulantes sur son visage et il répondit.

" Et comment ? Je ne sais même pas où elle est... "

Le singe ne laissa même pas l'Elfe continuer qu'il lui donna un léger coup de bâton sur la tête pour lui remettre les idées en place.

" Tu as des amis non ? La voie des airs t'es ouverte alors sers t'en pour la retrouver. "

Reno n'eut même pas le temps de prononcer un mot que Rafiki tourna son bâton dans le ciel et un hippogriffe vint se poser. Sans s'en rendre compte, l'Elfe se retrouva sur le dos du cheval ailé avec Rafiki à survoler les airs à la recherche de Raya. Toutes les affaires qui se trouvaient sur la plage y étaient restées, y compris le haut du garçon.

Au bout d'un certain temps, ils aperçurent une jeune fille qui regardait par terre. Ce devait être la Loup-Garou. L'hippogriffe se posa à distance pour ne pas effrayer Raya et Rafiki resta avec lui tandis que Reno s'approchait de la jeune fille. Une fois à portée, il remarqua une sorte de bouillie sur le dos de la main de la Loup-Garou et ne put s'empêcher de demander.

" Pourquoi es-tu partie ? Qu'est-ce qui s'est passé ? "

L'Elfe regardait le visage de la jeune fille en attendant une réponse sans se rendre compte qu'il était encore torse nu et que ses joues avaient encore des traces des gouttes d'eau qui étaient passées auparavant...

Raya ruminait ses pensées quand une bourrasque spectaculaire rejeta sa tignasse en plein sur son visage. Un cri aigu ressemblant a celui d’un aigle la fit faire une espèce de saut périlleux bizarre et elle se retrouva cul parterre, nez a nez avec ce qu’elle identifia comme un griffon mais qui, après analyse intégrale de sa morphologie, se révéla être en fait un hippogriffe. Et bien évidemment, devinez qui sauta du dos de celui-ci ? Elle aurait du l’anticiper. Ou même parier.

" Pourquoi es-tu partie ? Qu'est-ce qui s'est passé ? "
" Je… je… hum… "

Elle se refusait à le regarder dans les yeux. C’était vraiment gênant. Elle n’allait quand même pas lui dire qu’elle venait de vomir, cela pourrait être très mal interprété, et puis même, ce n’était pas convenable pour une jeune fille civilisée.

"Je viens de vomir."

Et bah si, elle l’avait dit. Pas possible. Les mauvaises habitudes n’étaient pas parties longtemps. Au moins, ca avait l’avantage d’être honnête, et c’était selon elle la qualité la plus importante en amitié.

"Mais, heeu… c’est pas de ta faute ! se reprit-elle. Je suis assez fragile en ce moment"

Pourquoi fallait-elle toujours qu’elle se justifie… C’était pas bientôt fini ? Elle se força à relever la tête et ses yeux butèrent contre un amas de tablettes de chocolat. Elle sursauta faiblement. Avec toute ces émotions, elle avait complètement oublié qu’il n’était toujours qu’à moitie habillé. Elle devint rouge, rouge comme un vieux saumon séché. Bien que dans un état franchement critique, elle n’allait pas se gêner pour se rincer l’œil. Il l’avait cherché. Bwahahaha, c’était bien foutu tout ca, dites-donc.

"En passant, tu devrais remettre ta chemise. Tu risques d’attraper froid."

Le dernier mot qu’elle avait prononcé résumait assez bien le ton de sa voix. Elle s’efforçait de rester le plus neutre possible pour ne pas traduire le peu d’agitation qu’il pouvait lui rester dans une telle situation. Bon, ok, elle en avait vu d’autres, mais bon, ses amis ne s’étaient pas mis direct torse nu des leurs premières heures de sympathie.

Avant tout, elle tenait à lui. Elle était déjà assez mal en point, et puis, sans vouloir en profiter, il était son seul moyen de retourner à l’internat. Elle inspecta les environs. Gauche : de l’eau, beaucoup d’eau. Avec du sel en plus. Bhaaaaa… Elle ne risquait pas d’aller bien loin. Droite : de la forêt, toute la forêt, que de la forêt, rien que de la forêt. A perte de vue, des arbres s’alignaient, s’entremêlaient, se tassaient dans une obscurité profonde. La vue des orties et des ronces grimpantes découragea la jeune fille. Elle y tenait, a ses magnifiques mollets de marbre. Mieux valait retourner la ou ils avaient laisse leurs affaires et les animaux puis rentrer tranquillement, voir peut être faire un arrêt ravitaillement en ville. A voir…

Invité

" Je… je… hum… "

La jeune fille n'osait même pas répondre au garçon et évitait ses yeux. Avait-elle honte de quelque chose ? Était-elle gênée ? Mais de quoi ? Reno voulut insister mais elle reprit la parole avant qu'il n'ait eu le temps d'ouvrir sa bouche.

"Je viens de vomir."

C'était si dur de le dire ? En tout cas, maintenant c'est dit. Vomir... A-t-elle pris froid sur la plage ? Remarque, le vent provenant de la mer n'a pas pour habitude d'être réchauffant... Ou bien le garçon avait-il dit quelque chose qui avait provoqué un haut le cœur à la jeune fille ?

"Mais, heeu… c’est pas de ta faute ! se reprit-elle. Je suis assez fragile en ce moment"

Fragile... Pas assez pour ne pas pouvoir courir un marathon afin d'aller se cacher et vomir tranquillement. Ses jambes étaient en pleine forme en tout cas, heureusement que les animaux ont aidé l'Elfe pour les recherches. Vu de haut il est toujours plus simple de trouver quelque chose ou quelqu'un.

Ce n'est qu'après ses paroles que Raya releva la tête qui rougit aussitôt. Son regard avait l'air de fixer le torse du garçon. Celui-ci ne comprit pas la raison de ce changement de couleur. Remarque, quand on a vécu dans la rue on ne pense pas à ce genre de chose. Reno n'y a jamais pensé et ne peut pas donc savoir de quoi il s'agit vu qu'il ignorait tout de ce domaine. Pour lui, c'était peut-être les quelques cicatrices qu'il a eu de son long séjour seul dehors...

"En passant, tu devrais remettre ta chemise. Tu risques d’attraper froid."

C'est vrai qu'il était toujours torse nu et l'Elfe se rendit compte qu'à cet instant qu'il avait oublié la chemise sur la plage. La voix de la Loup-Garou se voulait neutre, mais même si ce n'était pas le cas Reno avait peu de chance de remarquer quoi que ce soit. Il est qu'un simple débutant dans l'art de lire les sentiments à travers la parole. Par contre, Rafiki lui était plutôt doué et lisait souvent ce que ressentait le garçon comme dans un livre. Mais il ne pouvait boucher le gouffre se trouvant dans son cœur...

" La température est faite par la nature... Elle ne me fera rien. "

Voici l'un des avantages d'être un ami de la nature. La chaleur est produite par le soleil, le volcan ou encore des feux... Le froid quant à lui est créé par la pluie, le vent ou encore de la glace... Les Elfes qui prennent soin de la nature n'ont pas besoin de se préoccuper de ça. S'ils ont trop chaud, le vent vient les rafraichir. S'ils ont trop froid, les rayons du soleil caresse leur peau...

" Tu as besoin de quelque chose ? Pas que tu tombes malade... "

Reno voulait l'aider, mais sa voix était aussi neutre que celle de la jeune fille. Comment pouvoir exprimer de bons sentiments alors que le cœur souffre éternellement ? En plus, quand on est seul on a pas besoin de parler. Ce qui était donc quelque chose de normal pour les autres étaient impossible pour le garçon qui n'arrivait même pas à imprégner sa voix de joie ou d'une chaleur réconfortante.

" La température est faite par la nature... Elle ne me fera rien. "

La nature, comme il disait… Avait fait d’elle un monstre, une espèce de chimère morbide qui avait cause la mort de personnes humaines innocentes. La nature est comme n’importe quelle divinité. A la fois bonne et injuste. S’il se laissait mourir de froid, elle ne lui pardonnerait pas. Jamais de la vie. Il avait beau être un elfe, la nature ne pouvait pas le protéger de tout. Mais il ne fallait pas le brusquer en lui disant de but en blanc qu’il était d’une naïveté désolante. Il y avait quelque chose dans ce garçon qui lui faisait retrouver toute l’humanité qui était restée enfouie quelque part en elle.

" Tu as besoin de quelque chose ? Pas que tu tombes malade... "

Il était tout de même si gentil. Personne n’avait été aussi gentil avec elle depuis des lustres. Il y avait encore quelques heures, elle était toujours une jeune fille quelconque, bonne qu’a répandre le mal autour d’elle. Aujourd’hui, elle était une reine, on prenait en compte son avis, son bien être, on l’emmenait a la plage et on la faisait monter a dos de créatures fantastiques. C’était une farce ? Son père l’avait envoyé en thalasso, ou… ? Dans tout les cas, une reine se devait de prendre les devants, et malgré toute la bonne volonté qu’elle eut, elle ne put que se plier aux demandes de son estomac et de sa fatigue.

« Vu l’heure qui l’est, je pense qu’il vaut mieux manger et dormir ici, tu es d’accord ? »

Probablement. Elle se souvenait encore du premier regard qu’ils avaient échangé. Le sien était embué de larmes. C’était un elfe, il ne devait pas, tout comme la loup garou, apprécier l’atmosphère oppressante du pensionnat. A la simple pensée de cet endroit, un frisson parcourut son échine, une sorte de nœud se forma dans son estomac, semblant pourrir chaque molécule composant son être. Les gens, la vie, tout cela était comme une source de chaleur étouffante qui l’empêchait de respirer.

« Je pense qu’il faut que je passe en ville acheter des gâteaux, je sais pas pour toi mais moi il me faut du lourd, et je dois avoir encore un peu d’argent. »

Elle se voyait mal aller manger les poissons dans la mer devant Reno, qui ne pouvait être que végétarien convaincu étant donne ses relations fusionnelles avec les dits poissons. La simple pensée de la chair fondante d’un poisson dans sa bouche déclencha en elle un instinct carnivore qu’elle croyait avoir dépassé. Ses yeux se fermèrent un instant et elle se mordit la lèvre inferieure pour revenir à elle.

« Bon, on laisse nos affaires ? » dit-elle en orientant sa tête vers la direction d’où ils venaient.

» Pêchons des poissons (PV: Penombre)